[Presque seul à Venise] Jour 2 – sous la pluie

Décidément, en ce deuxième jour de balade, Venise n’est pas décidée à montrer son meilleur jour… à moins que ce soit justement l’inverse.

Ce matin, balade matinale dans le quartier (on dit « sestriere ») de Dorsoduro en essayant d’éviter les touristes, puis dans celui de San Marco, avec nettement moins de réussite. En partant, je découvre que mon auberge est juste à côté d’un atelier de réparation de gondoles, et pas n’importe lequel : il passe pour être le plus traditionnel des trois derniers ateliers de ce type encore en fonctionnement aujourd’hui.

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Par son labyrinthe de ruelles étroites et qui, parfois, ne mènent nulle part, Venise est vraiment incroyable. Se perdre est une façon géniale de découvrir la ville. Souvent, on peut toucher les deux côtés de la rue sans même allonger les bras. Chaque ruelle peut à tout à moment déboucher sur un canal en cul de sac ou, plus couramment, sur un pont.
Il y en a des centaines, généralement en pierre, toujours avec des marches. Les rues, ruelles, quais, culs-de-sacs, places et placettes sont innombrables. Les chemins se croisent, se longent, s’évitent, se retrouvent, se séparent… On a l’impression qu’il n’y a aucune logique là-dedans, et que les rues se sont tracées selon le bon vouloir de ceux qui ont construit leur immeuble. Parfois, on pense arriver dans une impasse, mais non, une autre rue est bien là, en face, qui passe sous un porche et contourne le bâtiment… ou mène sur pont qui ne débouche nul part.

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Au fil des heures, la pluie redoublant d’intensité, il faut bien se résoudre à se mettre à l’abri. Quand il pleut ici, ça ne fait pas semblant.

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Visiter le palais des Doges, oui, mais en passant par les coulisses. Et pour le coup, prépayer son billet par internet est un bon moyen d’éviter la loooooongue file à l’entrée d’attente. La visite thématique « Itinéraires secrets » nous emmène d’abord dans le minuscule bureau du responsable des archives secrètes, l’un des plus gros fonds d’archives au monde, après celui du Vatican (évidemment) et de Vienne en Autriche, ancienne capitale de l’empire austro-hongrois. Quelques mètres plus loin, c’est la salle de torture, plongée dans la pénombre pour que les suppliciés de puissent pas voir les trois inquisiteurs. Un étage plus haut viennent les prisons, les « plombs » car situés sous les toits (en plomb, donc). Je passe sur l’histoire de l’évasion de Casanova, car il paraît qu’il l’a très bien racontée lui-même. Enfin, on redescend pour rejoindre le circuit de visite ouvert à tous.
Dans ces pièces immenses du palais, tous les murs sont couverts de riches boiseries, d’or et de tableaux de maîtres, sans parler des plafonds. De la salle du Conseil des dix (la CIA locale) à la salle du trône du Doge (le président de la république de Venise), tout n’est qu’apparat et flatteries aux puissants. La salle du Grand conseil, où siégeaient tous les citoyens de Venise, est la plus impressionnante : ses cinquante-trois mètres par vingt-cinq en fond l’une des plus grandes d’Europe. On termine la visite par les salles d’armes, le pont des soupirs (que l’on traverse sans trop s’en rendre compte), et les « nouvelles prisons », le premier complexe pénitentiaire organisé connu.

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Le grand quai qui part de la place San Marco se prolonge à l’est de Venise sans discontinuer jusqu’au quartier Sant’Elena, sur « l’isola » du même nom. Situé tout au bout de l’île face à la lagune, il n’a rien à voir avec le reste de la ville. Probablement récent, ce quartier résidentiel est structuré par de grandes rues larges et bien pavées bordées d’immeubles d’habitation aux façades très colorées. Le linge pend aux fenêtres et au-dessus de la rue, la verdure est omniprésente au bord de l’eau, les fenêtres laissent échapper les sons de la télé, des enfants qui jouent, des parents qui cuisinent, du téléphone qui sonne… Plus de kiosques à souvenirs, presque plus personne, des gens qui font leur jogging en fin de journée, d’autres qui promènent leur chien et des grand-mères qui discutent sur le pallier en blouse et pantoufles. Étonnant changement d’ambiance, calme et reposante. On n’a pas trop envie de sortir l’appareil photo, de peur de leur voler leur intimité.

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On passe un pont en bois, pour arriver sur le dernier ilot avant la mer et, surprise, on tombe sur un stade. Vision un peu surréaliste que ce stade de 10 000 places planté entre les canaux. On se prend à imaginer à quoi doit ressembler un soir de match dans cet endroit : les joueurs arrivent-ils en bateau aux couleurs du club ? Et les bus des supporters de l’équipe adverse ? Et les vendeurs de sandwichs ambulants ? Le Venezia FC est en quelle division ? Quand est le prochain match ?…
Dommage, je ne me suis pas renseigné avant de partir, et mon Lonely planet est muet à ce sujet (c’est pas leur truc le foot aux australiens !). Il faut dire que je ne m’attendais pas à trouver un stade ici.

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Il fallait être sérieusement fou (ou Napoléon) pour tenter de prendre Venise. Rien d’étonnant à ce que la ville soit restée si puissante si longtemps. Venise est tout simplement impossible à assiéger. Vouloir l’attaquer, c’est s’engager dans une guérilla urbaine dont on ne peut avoir le dernier mot : non seulement la cité est un labyrinthe de ruelles, de ponts et de canaux, mais il faut aussi compter sur la hauteur des maisons (et donc à tout ce qui pourrait tomber sur la tête des assaillants), sans oublier toutes les ramifications que l’on ne voit pas entre les immeubles, par les cours intérieures et les passages fermés au-dessus des rues.
Le seul moyen d’assiéger Venise est de la couper de tout contact avec la mer, et donc de ravitaillement, ce qui nécessite une sacrée marine, ce qu’à donc fait Napoléon en 1793 pour accomplir ce qu’on a appelé « le siège de Venise » (qui n’a rien a voir avec le trône du Doge 😉 ).

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En plus

  • Le site du palais des Doges (pour réserver son billet) : palazzoducale.visitmuve.it
  • Le site du Venezia Football Club : www.veneziafc.club
  • Le « Que sais-je » à lire avant de venir pour survoler la passionnante histoire de la cité : Histoire de Venise, par Christian Bec (PUF, 2010, 125 pages, 9 €)