[Milano Lomo] Jour 2 – aux musées

Au deuxième jour, on se réfugie à l’ombre des chefs-d’œuvre.

Au matin du deuxième jour, échaudé (c’est le cas de le dire), par la chaleur étouffante de la ville, on prend la direction des musées incontournables (et climatisés) de la ville.

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Direction la pinacothèque de Brera, l’un des plus grands musées italiens. Il est installé au 1er étage d’un ancien collège jésuite organisé autour d’un grand cloître néo-renaissance qui abrite également une université de sciences. Pour qui est un peu curieux, on peut donc rapidement se perdre dans les couloirs du rez-de-chaussée, vides d’étudiants en cette période estivale. C’est sombre, absolument pas rénové, et finalement beaucoup plus authentique que la partie touristique du bâtiment. La peinture des grands couloirs sous voûte s’effrite, des petits papiers collés sur les portes en bois signalent les labos de langue, les bureaux de l’administration, les salles de cours… On retrouve des échafaudages un peu partout, et des touristes perdus (volontairement ou non) auxquels on ne dit rien.

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La pinacothèque en elle-même est très riche de peintures religieuses du 14e au 18e siècle, dont des curiosités intéressantes comme le « Predica di San Marco in terra di Alessandria » de Bellini. Un peu plus loin, on croise une étroite galerie de peintures du 20e siècle, résultant d’une collection cédée au musée. Très étonnant de voir là, au milieu des salles dédiées au 15e siècle, un Braque et un Picasso côte-à-côte, et deux Modigliani.
Les salles s’enchaînent autour du cloître, changeant de couleur comme on change de siècle. On croise deux reconstitutions de chapelles couvertes de fresques, et plusieurs endroits où un pan de mur a été complètement arraché pour mettre une œuvre en restauration.

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A la fin de la visite, dans l’une des deux salles dédiées au 19e, on s’attarde devant le superbe tableau « La fiumana » de Pellizza da Volpedo, version préalable du chef-d’œuvre du maître « Il Quarto Stato » (exposé dans un autre musée milanais). Hommage au monde ouvrier, on y voit une foule immense en mouvement, menée par un homme fier qui s’avance droit sur nous. C’est très beau, plein de mouvement, comme une photo en pause longue au crépuscule où seul le personnage principal est net, la mise au point sur sa main droite qui porte sa veste sur son épaule. Les autres visages se distinguent dans les flous de bougés. Magnifique.

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Impossible de quitter la ville sans avoir vu ce qui fait sa renommée mondiale, la « Cène » de Léonard de Vinci, au Cenacolo Vinciano. C’est un passage obligé pour qui vient à Milan et, malheureusement, la découverte de la « Cène » est à la hauteur de son statut de patrimoine de l’humanité, un peu arrogante.

En cette fin de saison, le personnel est d’une humeur de chien, accueillant la foule de touristes avec dédain dans ce qu’on a pompeusement appelé un « musée ». En réalité, il n’est composé que du réfectoire du monastère où se trouve la peinture (car ne n’est pas une fresque, ce qui explique son mauvais état de conservation), et d’une boutique de souvenirs. On aurait pu espérer un vrai musée, ou au moins une sorte de sas explicatif sur l’œuvre, son créateur, son histoire… Pour tout cela, il y a l’audioguide, payant en plus de l’entrée évidemment. Pour des raisons évidentes de conservation (mais aussi pour les finances du monastère, qui fait payer cher un privilège rare), la visite est limitée à 15 mn par groupe d’une trentaine de personnes (réservation en ligne obligatoire, plusieurs jours en amont).

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Passé cette mauvaise expérience, on la découvre. La « Cène » de Léonard occupe tout un côté du réfectoire, juste au-dessus de l’ancienne porte d’entrée. Les moines ayant voulu agrandir cette porte au 19e siècle, ils ont tout bonnement percé le mur, rabotant sans vergogne les pieds du Christ ! La peinture est très grande et, il est vrai, en assez mauvais état. La faute à la technique employée par Vinci, qui ne voulait pas se presser et n’a donc pas employé la technique de la fresque qui impose de travailler vite avant que l’enduit ne durcisse. Non, il a préféré peindre tranquillement et directement sur le mur ce qui, forcément, n’est pas fait pour durer des siècles, et empêche toute sauvegarde du tableau.

Depuis sa création, la « Cène » n’a pas eu une vie tranquille. Outre le rabotage des pieds du Christ par les moines, le réfectoire a subit un bombardement pendant la guerre civile de 1936, qui a fait s’effondrer le mur latéral et la voûte, laissant plusieurs années la peinture à l’air libre. Et puis il y a eu les premières restaurations qui ont surtout été des repeints (dont tous les visages) ne laissant plus grand chose de l’original. Une dernière restauration a consisté à reprendre tout ça, à enlever les repeints, et à consolider l’œuvre de Vinci, dont il ne faut cependant pas s’approcher trop près.
De l’autre côté du réfectoire se trouve une fresque (une vraie, celle-ci) représentant la crucifixion qui permet de comparer les techniques employées. L’œuvre est beaucoup plus classique, d’un peintre beaucoup moins connu… et beaucoup mieux conservée.

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Pour qui aime les grandes villes, Milan est parfaite. Pour moi, c’est un peu trop. Demain, direction Stresa, au bord du lac Majeur, pour la fin de ce projet photographique néo-vintage.


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